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Mon petit frère est handicapé mental : on oublie que nous, la famille, on en bave

Par Olivia Fuchs
Responsable Communication http://leplus.nouvelobs.com/contribution/517808-mon-petit-frere-est-handicape-mental-on-oublie-que-nous-la-famille-on-en-bave.html

 

 

 

LE PLUS. Le syndrome X-Fragile ne vous dit probablement pas grand chose, pourtant, il touche environ 12.000 personnes en France. Comme l'autisme ou la trisomie 21, ce handicap mental est relativement mal pris en charge. Olivia Fuchs, dont le petit frère est atteint de ce syndrome, pousse un cri d'alarme en faveur de ces laissés-pour-compte.

Édité et parrainé par Helene Sergent

 

Ce lundi, la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme a permis de revenir sur ce handicap répandu et pourtant si méconnu. C'est une belle initiative. Et puis c'est important de faire des campagnes d'information. L'autisme sert un peu de locomotive pour tous les estropiés de la vie, tous les handicapés mentaux.

Car vous ne le savez peut-être pas, mais il n'y a pas que l'autisme et la trisomie 21 en matière de handicap mental. Vous ne le savez peut être pas non plus mais on estime que 0 à 15% des autistes sont en fait porteurs du syndrome de l'X-Fragile.
 
 
 
Qu'est ce que le syndrome de l'X-Fragile ?
 
Le portail dédié aux maladies rares le définit de la façon suivante :
 
"Le syndrome de l'X-fragile est caractérisé par l'association de particularités physiques, comportementales et cognitives. Les particularités physiques incluent un aspect du visage, évolutif avec l'âge, mais suffisamment particulier pour être évocateur du diagnostic chez les garçons présentant un certain retard mental. À ces troubles cognitifs s'associent des troubles de l'attention et des signes d'autisme. Cette affection est liée à la mutation d'un gène situé sur le chromosome X."
  
Mon frère de 18 ans est atteint du syndrome X-Fragile en mutation complète. J'ai longtemps abordé ce sujet sur mon blog afin de sensibiliser les internautes sur cette maladie totalement inconnue du grand public. 
 
Familles en souffrance 
 
Ma mère s'est littéralement défoncée pendant des mois, des années, pour qu'Hugo soit diagnostiqué au service génétique du CHU dont on dépendait. Ensuite, il a fallu faire toutes les démarches pour obtenir des séances de rééducation psycho-motrices dans les Centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP). Relances, paperasses et interminables coups de fils se sont suivis pour qu"Hugo puisse intégrer un institut médico-pédagogique.
 
Idem pour une prise en charge en taxi, rebelote pour bénéficier de la carte handicapé... Mais bon, on en parle pas, ça choque. Et puis c'est chiant, c'est pas drôle. C'est pas gai de causer "handicapés".
 

Centre Albert Camus pour enfant autistes, France, (BAZIZ CHIBANE/SIPA) 14/11/2008 
  
Et puis finalement, à part ceux qui se retrouvent directement concernés, globalement les gens s'en cognent. Politiciens compris. Pouvoirs publics compris. Ça demande de l'argent, du temps, du personnel, bref c'est une vraie chienlit pour les gouvernements les handicapés mentaux. 
  
Le livre magistral de Jean-Louis Fournier, "Où on va papa", résume relativement bien le quotidien des familles confrontées au handicap mental. Il a la délicatesse de tourner ça à la rigolade. Parce que, bien sûr, il vaut mieux en rire.
 
La réalité c'est que, au delà de l'Autisme et des enfants handicapés ballottés entre institut médico-éducatifs et autres services de jour à l’hôpital, les familles en chient grave. Et je pèse mes mots.
 
Mes mots sont durs parce que je constate que, quinze ans plus tard, c'est toujours le même bordel. Je me suis inscrite sur plein de réseaux sociaux, de toutes nationalités confondues, je me renseigne sur ce handicap, je témoigne en tant que grande sœur, porteuse comme ma mère de cet "X-Fragile" et je lis et relis les mêmes témoignages des parents, qui galèrent toujours autant pour scolariser leurs enfants.
 
l'autisme n'est, hélas, que la face visible de l'iceberg. La vérité c'est que, au sein des familles touchées par le handicap mental, certains parents craquent, les couples se déchirent, bref, il y a souffrance.
 
Ce qu'on ignore, ou ce qu'on ne veut pas admettre, c'est que quand il y a du handicap mental tout le monde prend sa dose de souffrance : les parents, la fratrie, tout le monde porte. Alors bien sûr ce n'est pas non plus du Zola tous les jours hein, faut pas déconner. On s'habitue au handicap. On apprend à vivre avec. Et puis on s'aime. J'aime mon frère plus que tout et surtout je l'aime comme il est. Mais la société est encore en retard, frileuse et discriminante vis-à-vis des handicapés.
 
Des infrastructures insuffisantes 
 
Et au-delà de déni de notre société, les gouvernements ne font rien. Pas assez. Il faut des structures, davantage. Des éducateurs, encore plus et encore mieux formés, plus de rééducation adaptée à chaque handicap et une véritable prise en charge, y compris pour les adultes, notamment quand les parents meurent !
 
Évidemment, dans la grande famille des handicapés mentaux, il y a des personnes plus ou moins atteintes. Certains s'en sortent mieux que d'autres côté autonomie mais un paquet ne peuvent aller en Centre d'aide au travail (CAT). Que font-ils ceux-là ? Comment les parents gèrent-ils la prise en charge quotidienne ?
 
Les handicapés mentaux ont un cœur, sont capables de souffrance, de chagrin et de joie... On ne peut décemment pas les abandonner dans des hospices en les laissant attendre la mort.
 
Perce Neige semble être une des rares associations qui relève, au mieux, le défi de permettre aux adultes handicapés mentaux d'avoir un cours de vie adapté et plus agréable. Mais il n'y a pas assez de centres, pas assez de prise en charge, d'aides ou d'investissements !
  
Alors je sais bien c'est "la crise" ! L'État n'a plus de pognon paraît-il. Mais tous les impôts que nous payons sont-ils correctement utilisés ? Est-ce que les dépenses publiques sont-elles vraiment priorisées ? Est-ce que les conseils généraux, les collectivités, l'État dans sa globalité ont un cahier des charges cohérent avec les réels besoins des gens ?
 
Les laissés pour compte de la société, les handicapés ont aussi le droit eux d'avoir une vie décente. Alors les politiciens sont bien gentils avec leurs grandes journées mondiales, les campagnes d'information commandées pour soulager leurs consciences, mais, concrètement, que fait-on pour les handicapés mentaux et leurs familles en 2012 ? 
 
 
À lire aussi sur Le Plus :
 
- Autisme : j'enseigne le piano à des jeunes pour les aider dans le handicap, par François Dorocq, présidente de l'association A.P.T.E Autisme



02/05/2012
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