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Affaire « Le Mur » : le genre documentaire menacé:Reporters sans frontières est profondément inquièt

Affaire « Le Mur » : le genre documentaire menacé

Publié le mardi 7 février 2012.

Reporters sans frontières est profondément inquiète du précédent que constitue la condamnation, le 26 janvier 2012, de la documentariste Sophie Robert pour « dénaturation des propos » de trois psychanalystes interviewés dans son film, « Le Mur ».

« Le juge lillois s’érige en contrôleur du travail journalistique lorsqu’il prétend statuer sur les choix de montage de Sophie Robert, a déploré l’organisation. C’est d’autant plus grave que les conséquences sont significatives : même si elle fait appel, la documentariste est à la merci des huissiers qui lui réclament le recouvrement immédiat de plus de 25 000€. Après la saisie des rushes incriminés, en octobre, on ne peut qu’être à nouveau choqué par cette condamnation disproportionnée. »

« Le raisonnement du juge est extrêmement dangereux pour l’avenir du film documentaire. Le parti pris, la défense d’une thèse, consubstantiels à un sujet si polémique, ont été assimilés à de la dénaturation. Chaque personne interviewée pourra-t-elle désormais demander la saisie des rushes de ses déclarations et en exiger le retrait ? Ne va t-on tolérer que les documentaires aseptisés, édulcorés ? »

Le 26 janvier 2012, le Tribunal de grande instance de Lille a condamné Sophie Robert à verser entre 5 000€ et 7 000€ à titre de dommages et intérêts à chacun des trois psychanalystes interviewés dans son film, « Le Mur – La psychanalyse à l’épreuve de l’autisme ». Les interventions d’Eric Laurent, Esthela Solano-Suarez et Alexandre Stevens doivent en outre être retirées du film, et un communiqué judiciaire doit être publié. En vertu d’une décision assortie d’« exécution provisoire », les condamnations doivent être appliquées immédiatement malgré l’appel de la documentariste.

Le film de Sophie Robert constitue une charge contre le traitement de l’autisme par la psychanalyse française, que la documentariste juge rétrograde et culpabilisateur. Les trois psychanalystes, qui avaient signé une autorisation d’utiliser et de couper leurs propos, estiment néanmoins que ceux-ci ont été déformés dans le film.

« ‘Le Mur’ contribue à un débat d’intérêt général sur le traitement de l’autisme par la psychanalyse. Il est donc protégé par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme sur la liberté d’expression et la jurisprudence qui en dérive. Or, à aucun moment le juge n’a évoqué le droit à l’information du public, ni les principes reconnus par les juges de Strasbourg : l’admission d’une ‘certaine dose d’exagération’, la prise en compte de la ‘bonne foi’, l’acceptation des idées qui heurtent ou qui choquent… Sans parler de la proportionnalité de la peine avec les dommages causés et les moyens financiers de la défenderesse. L’usage de l’article 1382 du Code civil (droit commun de la responsabilité civile) est regrettable, car il n’a pas permis d’apporter à Sophie Robert les garanties de dispositions plus spécifiques », a poursuivi Reporters sans frontières.

L’organisation soutient l’appel imminent de la documentariste et espère que la justice prendra cette fois-ci en compte le principe, à valeur constitutionnelle, de la liberté d’expression.

 

http://fr.rsf.org/france-affaire-le-mur-le-genre-07-02-2012,41810.html




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